Tu fais quoi dans la vie? (PV Shinobu)

Chiyo surfait sur le Net, à la recherche d’un bon petit film à écouter. C’était la première journée de cours, et les professeurs ne lui avaient pas trop donné de devoirs. Elle avait donc une longue soirée à meubler, et quoi de mieux dans ces cas-là que de relaxer dans son lit avec un classique en noir et blanc? Elle tomba sur « Casablanca », et décida de se l’acheter en ligne. Elle voulait éviter le plus possible les sites qui permettaient de télécharger des films illégalement, car elle avait une peur bleue de se faire un jour appréhender par la police. Et avec l’Internet, on sait jamais…

Le grincement d’une porte la fit sursauter. Cela se pourrait-il qu’on lui ait déjà assigné une compagne de chambre? Étant ici depuis déjà quelques jours, elle croyait qu’elle allait avoir cette grande chambre pour elle toute seule. Oh, n’allez pas penser qu’elle était égoïste et voulait tout pour elle seule! Elle craignait tout simplement avoir affaire à une des filles de sa classe de l’an dernier, qui ne trouvaient rien de mieux à faire que de glousser entre elles en parlant de ce qu’elles lisaient dans leurs magazines. Quelle ne fut donc pas sa surprise d’apercevoir une jeune fille de première année pousser la porte! Chiyo prit une grande respiration, essayant de se donner le courage de lui adresser la parole. Après tout, elles passeraient toute l’année ensemble dans cette chambre, mieux valait ne pas passer pour une ermite!

- Bonjour, hum…Je m’appelle Chiyo et je suis en deuxième année…

Déposant son ordinateur portable sur sa table de chevet, elle s’approcha en baissant la tête, et lui tendit la main avec un petit sourire timide.

[ Désolée pour le peu de mots, je fais toujours des débuts un peu courts ^^' ]

Même avant de lui parler, Chiyo sentait que cette fille n’était pas méchante. Elle avait l’air toute douce, sans une once de cruauté, de condescendance ou de préjugés. La plupart des gens sympathiques préféraient se mettre amis avec des boursiers, car les riches avaient la réputation d’être d’horribles têtes enflées. Ils se croyaient plus intelligents que tout le monde, même si ce n’étaient pas eux qui avaient du mériter leur place à l’académie…

- Hi ! I'm Shinobu Hamilton, in the first year, and ...

Tiens tiens, une étrangère! Chiyo était loin d’être raciste, mais avait toujours affiché une certaine curiosité face aux autres cultures. C’était dans ce genre de moments qu’on se considérait chanceux d’avoir des cours d’anglais depuis l’école maternelle…

- Hm, désolée, je suis anglaise et j'ai une sale habitude de parler anglais .. Je suis Shinobu Hamilton et je suis en première année, classe d'artiste, participant aux clubs de dessin et de photographie. Enchantée ! J'espère que nous serons bonnes amies durant cette année !

Chiyo eut un léger sourire. Elle appréciait de plus en plus cette jeune fille, qui démontrait beaucoup de bonne volonté en plus d’avoir la conversation facile! Elle adorait ce trait de caractère, préférant laisser la parole aux autres plutôt que de parler d’elle-même.

À son grand étonnement, elle vit sa nouvelle connaissance se diriger vers la fenêtre afin d’empêcher le soleil d’y pénétrer. Elle avait bien remarqué que sa peau était très pâle, donc très sujette aux coups de soleil. Elle se promit d’éviter d’ouvrir les volets à l’avenir, pour ne pas lui déplaire. Ça commencerait mieux mal une nouvelle relation, non?

- Bon ... Euh, j'ai un truc important a te dire, même si on ne se connait as trop. J'ai une maladie particulière qui est l'albinisme. Il faudra donc faire attention a garder la pièce froide et a ne pas laisser le soleil s'exposer dans la chambre quand je suis là. En cas de malaise, pas la peine de paniquer, même si j'ai l'air d'une morte, t'attend 5-10 minutes, et si je me réveille pas, là, inquiète toi. Après ça, je suis une grosse gourmande donc laisse pas de gateaux trainer si tu veux les retrouver .. ! Oh excuse moi, je parle je parle, mais ce n'est peut-être pas interessant. C'est quoi qui te passionne toi ?

Eh bien, ça n’allait décidément pas être de tout repos avec elle! Au moins sa maladie ne la rendait pas apathique et irritable, comme certains autres. Il ne serait donc pas trop difficile de la traiter comme n’importe qui d’autre.

- Ce qui me passionne? Hum…Les films, c’est sûr. Je suis dans le club de cinématographie, où on partage nos coups de cœur…Parfois même, on va au cinéma ensemble. Mais je préfère les vieux films, des années 30 à 60 environ. Je trouve que ça leur donne un…charme.

Chiyo rougit légèrement, gênée d’avoir parlé autant. Elle n’avait pas l’habitude de discuter avec des gens, sauf lorsqu’elle était obligée de faire des travaux d’équipe dans ses classes.

- Désolée de…d’avoir parlé aussi longtemps, c’est juste que quand on parle de films je m’enflamme facilement. Sinon, j’adore la lecture. Je suis quelqu’un d’assez tranquille, en résumé…Plutôt le contraire de toi.

Quel plaisir c’était que de constater que les gens extravertis n’étaient pas tous des gosses de riches insupportable! Chiyo devrait vraiment s’écrire quelque part qu’elle devrait ouvrir les fenêtres, parce qu’avec une attitude aussi débonnaire personne n’aurait pu croire qu’elle avait une aussi grave maladie. Il faut dire que son apparence était singulière, mais à force de l’entendre parler ça s’oubliait comme un charme.

Chiyo eut un léger sourire en l’entendant se répéter. C’était mignon, et elle n’avait pas l’air mal à l’aise le moins du monde.

- Oups, désolée, je te l'ai déjà dit ça ..

- Ça ne me dérange pas du tout, ça arrive à tout le monde.

Ce n’était cependant pas tout le monde qui le prenait aussi bien, et agissait comme si tout était normal. Décidément, cette fille avait beaucoup à lui apprendre…

- Comme nous parlons de passions, tu es en littéraire ou en scientifique? Enfin je pose la question, mais tu as l’air plutôt du type artistique que scientifique.

Chiyo se maudit mentalement d’avoir dit une chose pareille. Et si elle le prenait comme une insulte? Elle n’avait pas voulu insinuer qu’elle n’était pas intelligente, mais paranoïaque comme elle était, elle pensait déjà au pire…

Chiyo ne put s’empêcher de sourire et de hocher la tête tout au long de la tirade de Shinobu. Elle était parfaitement d’accord avec elle sur tous les points, détestant elle-même les maths. En fait, le mot était faible, elle en avait une sainte horreur même si elle récoltait généralement des notes dans la moyenne. Elle essayait d’apprendre les formules, mais après l’examen elle ne tardait pas à les oublier. Et puis contrairement à la littérature et au cinéma, qui élargissaient vos connaissances et favorisaient l’ouverture d’esprit, à quoi ça lui servirait de trouver la distance entre un point et une droite plus tard?

Elle prit le livre que Shinobu lui tendait avec curiosité, et lut la quatrième de couverture en diagonal. Ça avait l’air pas mal, et elle était justement en quête d’un nouveau roman à se mettre sous la dent.

- Tu peux me…Enfin, je veux dire…Je peux te l’emprunter? Mais sens-toi à l’aise de dire non, hein…Mais je peux le lire uniquement dans la chambre, pour que tu saches toujours où il se trouve…

Ah, qu’est-ce qui lui avait pris de lui demander un service alors qu’elles se connaissaient à peine? Elle aurait pu l’emprunter à la bibliothèque, ce bouquin, et elle n’aurait pas eu l’air d’une profiteuse qui passait son temps à quémander…

Elle…elle le lui prêtait vraiment? Pour être honnête, elle s’était attendue à ce qu’elle lui réponde par la négative. Non pas parce qu’elle avait l’air égoïste ou quoi que ce soit du genre, mais elle semblait tenir à ce livre, c’était son préféré après tout… Chiyo se promit de se dépêcher à le lire, pour minimiser le plus possible le risque de le perdre ou de l’abîmer…

- Merci…beaucoup…Ne t’en fais pas, j’y ferai très attention!

Elle fut interrompue par un bruit très étrange, et elle adressa à sa compagne un regard interrogateur. Celle-ci, un peu gênée, s’excusa avant de sortir un sac de beignets. Chiyo la regarda s’empiffrer, et ses yeux s’ouvrirent comme des soucoupes. Elle n’avait jamais vu une aussi petite personne manger autant de nourriture en si peu de temps!

Elle éclata de rire lorsque Shinobu releva la tête, et se dépêcha de mettre sa main devant sa bouche pour ne pas être trop impolie.

- Non merci…J’ai déjà mangé, et je n’aime pas trop les collations sucrées…Je préfère manger léger.

En fait elle n’avait pas « mangé », juste bu un peu de thé, mais elle n’était pas obligée de le spécifier.

- Est-ce que tu manges toujours autant? Parce que c’est le dîner bientôt, et tu risques de ne plus avoir très faim…

Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette fille réservait bien des surprises! En la voyant on pensait tout de suite que c’était quelqu’un de fragile de par sa constitution et son apparence, mais c’était tout un phénomène! Chiyo songeait que ça allait lui faire du bien d’avoir une camarade de chambre aussi enthousiaste et extravertie, elle apprendrait peut-être à s’intéresser un peu plus aux autres? Et puis ça avait l’air d’être une fille bien, très généreuse. Enfin quoi, on n’offrait pas des donuts à la première personne venue! Chiyo avait refusé, mais elle devait bien admettre que ce serait très impoli de refuser un cadeau…

- Eh bien, tu as l’air très…convaincante. Je crois que…Je vais en prendre un, mais juste un! C’est très gentil à toi de vouloir m’en offrir et je ne veux pas te contrarier, mais je n’ai vraiment pas faim…

Chiyo plongea sa main dans le sac, et retira un petit donut. Quand elle le porta à sa bouche, son regard s’illumina. Elle n’avait vraiment pas menti! Même si ce n’était pas vraiment son genre d’aliments, il était indéniable que cette pâtisserie avait un goût incomparable.

- Tu…tu avais raison. C’est vraiment bon, alors raison de plus pour que ce soit à toi de les manger…

Chiyo rougissait à vue d’œil, embarrassée par l’attitude de sa camarade de chambre. Puis elle réalisa qu’elle avait fait fi d’une importante règle de politesse, et essaya de se rattraper.

- Tu veux que je t’aide à défaire tes valises? Ne le…ne le prends surtout pas comme une intrusion dans ta vie privée, je veux juste…t’être utile.